A Winnenden en Allemagne, mercredi 11 mars, un jeune homme a ouvert le feu dans un collège, puis dans la rue, faisant 15 morts et huit blessés, avant de se suicider.
Il est 9 h 30 mercredi 11 mars lorsque Tim K., 17 ans, pénètre dans le collège Albertville, à Winnenden. Il est habillé en tenue de combat noir, armé d’un pistolet-mitrailleur.
L’établissement qui compte également un lycée est fréquenté au total par un millier d’élèves. Tim y a terminé ses études l’an dernier, et suit depuis une formation professionnelle. Il choisit les deux classes dans lesquelles il va se rendre, fait irruption en plein cours, tire autour de lui, tue neufs élèves, trois professeurs et blesse plusieurs écoliers. Puis il disparaît.
Tout s’est déroulé en quelques minutes.
Mille policiers sur place
En quelques minutes, policiers, commandos spéciaux, hélicoptères ambulances, véhicules de secours rejoignent Winnenden, une ville de 30 000 habitants, à 20 km de Stuttgart, la capitale du Bade-Wurtemberg, bastion de l’industrie automobile et l’une des régions les plus riches d’Allemagne. Les blessés sont évacués, les élèves sont rassemblés dans le hall et pris en charge par des équipes de soutien psychologique.
La police cerne les bâtiments. Mille policiers environ seraient sur place. Mais pas de trace du criminel. Il est midi et une colonne de policiers se dirige à nouveau vers l’école, pistolets mitrailleurs en joue. Devant les bâtiments, la peur est palpable, Les visages sont pâles, tendus. Bruits et rumeurs se propagent : on ne sait pas où est passé le fuyard. L’entreprise Schنffer, à deux pas, a fermé ses portes pour protéger son personnel. L’adolescent meurtrier est signalé près d’un hôpital psychiatrique. Il aurait tué à nouveau un passant. Il aurait pris un véhicule et son conducteur en otage, le contraignant à le conduire jusqu’à l’autoroute.
Sur les chaînes de télévision, les images de policiers en armes se mêlent aux premières réactions et interrogations. Tim K. est retrouvé, encerclé par la police sur le parking d’un centre commercial, à 40 km de Winnenden. Il aurait ouvert le feu, tué encore 3 personnes avant de retourner son arme contre lui.
Il paraissait calme
Günther Oettinger, ministre président démocrate-chrétien du Bade-Wurtemberg (CDU) accouru sur place a le visage figé par l’émotion. « C’est un acte inexplicable, horrible, qui frappe les écoliers, les parents, les équipes éducatives ici justement dans une école, lieu de l’avenir, de la formation et de l’éducation. »
Les premiers témoignages, contradictoires, tentent d’expliquer pourquoi Tim K. a réalisé ce massacre, sans éclairer grand-chose. Le jeune garçon ne s’était jamais distingué par une agressivité particulière. Au contraire. Il paraissait calme, rangé. Il avait sans doute une « double personnalité », suppose le ministre de l’éducation du Land, Helmut Rau. Son père est entrepreneur. L’adolescent vivait au milieu d’une famille aisée, dans une villa confortable. La famille aurait disposé d’une collection de dix-huit armes à laquelle il avait accès.
Très émue, Ursula von der Leyen, ministre fédérale de la Famille, démocrate-chrétienne, évoquait mercredi la « spirale de l’isolement » dans laquelle s’enferment parfois des jeunes, sans amis, sans relation, blessés par un échec et qui, peu à peu, construisent un scénario délirant pour en sortir. « Depuis qu’il y a des massacres de ce type, on recherche les raisons qui poussent des jeunes à en devenir les auteurs », remarquait un policier psychosociologue. Désabusé, il soulignait combien les images même de ces drames, diffusées en boucle sur les écrans, peuvent être une incitation pour de futures autres tragédies.
De fait, les enquêteurs ont annoncé jeudi qu##ils avaient découvert des jeux vidéos violents au domicile du tueur. “Nous avons examiné son ordinateur et trouvé des jeux vidéos typiques à ce genre de forcené”, a indiqué Ralf Michelfelder, un responsable de la police locale.
Andrea Lochmann, 19 ans, s##interroge sur un manque affectif. “Tout le problème est sans doute dans une incompréhension de génération, d##incapacité à être comme les parents le voudraient”.
“La faute aux parents c##est facile, en fait c##est la faute à tout le monde, à la société”, estime au contraire Heidi Lِbe, cadre commerciale. Elle fait remarquer que le jeune, sportif, vivait dans une maison confortable du village de Lautenbach “ne donne pas l##image d##un marginal”. “Ca ne cadre pas avec l##idée que l##on se fait d##un tireur fou”, estimait aussi Hans Gross, un employé communal.
Peu de témoignages encore sur la personnalité du forcené, dont on sait simplement qu##il s##entraînait au maniement des armes dans le club de tir de son père.
Les voisins de sa famille à Lautenbach évoquent un garçon qui a grandi “sans histoires” et qui ne se faisait pas remarquer. L##adolescent semble cependant avoir été renfermé. “Il n##était pas accepté et passait sa journée assis devant son ordinateur”, a déclaré jeudi un de ses condisciples identifié simplement comme Mario à la chaîne de télévision N24.
Mercredi soir, alors que la police scientifique s##affairait encore dans le collège ensanglanté, un service religieux oecuménique a réuni un bon millier de personnes. La Croix rouge locale a dû intervenir à plusieurs reprises pour évacuer des jeunes en pleurs, à la limite du malaise.
Dans la hall de la mairie un grand panneau de prévention met en garde contre “la violence dans les vidéos” et dénonce le “happy slapping”, où l##on filme sur son téléphone portable des bagarres ou des agressions gratuites dans les cours de récréation et les salles de classe.