Les élections, en Israël, ne se déroulent jamais comme prévu. C##est finalement Kadima, le parti dirigé par Tzipi Livni, ministre des Affaires étrangères qui arrive premier, devançant d##une courte tête le Likoud de Benjamin Netanyahou pourtant favori. Et au passage, c##est un pays difficilement gouvernable qui sort de ces urnes morcelées. L##homme fort, à l##issue du scrutin, est assurément Avigdor Lieberman, le leader populiste d##extrême droite du parti Israël Beiteinou (“Israël notre maison”), arrivé troisième, Les travaillistes, pour leur part, enregistrent leur plus mauvais score historique et terminent bon quatrième. En participant au gouvernement et à la guerre de Gaza, ils auront eu le déshonneur et la défaite électorale, une déconfiture personnelle pour Ehud Barak qui pensait avoir redoré son blason en conduisant les opérations militaires à Gaza.
La droite gagne
A Kadima, comme au Likoud, tout le monde crie victoire. Au terme d’un scrutin extrêmement serré, les deux principaux partis israéliens sont chacun en position de revendiquer le poste de Premier ministre. Selon les résultats finaux, le parti Kadima au pouvoir (centre-droit) de Tzipi Livni obtient finalement 28 sièges, contre 27 pour le Likoud, principal parti de l##opposition de droite mené par Benjamin Netanyahou. La formation d##extrême droite d##Avigdor Lieberman, Israel Beiteinou (Israël notre maison) accède au rang de troisième force politique d##Israël, avec 15 députés, confirmant la percée de ce parti ultranationaliste qui ne comptait que 11 sièges dans la dernière assemblée. Pour les travaillistes en revanche, la chute est rude. Le parti d’Ehud Barak n’obtiendrait que 13 mandats. C’est le score le plus bas de l##histoire de cette formation qui a longtemps dominé la politique israélienne. Le taux de participation s’établit à 65,2% des inscrits, soit une de 1,7 point par rapport au dernier scrutin en 2006, malgré une campagne apathique qui n’a guère suscité d’enthousiasme.
Dès mardi soir, le chef de file de Kadima a donc lancé un appel à un gouvernement d##union nationale, qui pourrait aller des travaillistes s##ils acceptent, jusqu##à l##extrême droite de Lieberman, en passant par certains partis religieux. Et Livni pourrait même accepter une rotation à la tête du gouvernement, avec Netanyahou qui n##accepterait sans doute pas une formule qui l##écarterait du poste de Premier ministre [Le Likoud a rejeté mercredi matin l##idée d##un Premier ministre tournant, revendiquant la victoire pour le “bloc de droite”. Cette configuration rendra toute négociation de paix envisagée par les Etats-Unis quasiment impossible, même si la droite israélienne a parfois su se montrer plus pragmatique que ses postures idéologiques ne le laisseraient supposer, de Menahem Begin qui a restitué le Sinaï à l##Egypte, à Ariel Sharon qui a retiré les colons juifs de la bande de Gaza.
A noter que Kadima obtient 28 sièges sur les 120 que compte la Knesset, le parlement israélien, le Likoud en compte 27, Israël Beiteinou d##Avigdor Lieberman 15 sièges, le Parti travailliste seulement 13, le parti religieux séfarade Shass compte 11 sièges, et deux autres partis religieux 8 sièges au total, l##Union nationale (extrême droite, autrefois alliés de Lieberman), 4 sièges, quant à la gauche pacifiste du Meretz, elle compte seulement 3 sièges, payant ainsi le fait d##avoir été le seul parti à s##opposer à la guerre de Gaza. Enfin, les listes arabes ou mixtes juifs-arabes remportent au total 11 sièges.
Beny sera-t-il le Premier ministre?
En Israël, le mode de scrutin proportionnel impose au chef de gouvernement de former une coalition pour parvenir à la majorité requise de 61 sièges, sur les 120 que compte la Knesset. Même en rassemblant large, le bloc de gauche (Kadima, Travaillistes, Meretz (gauche sioniste) et les partis arabes) ne compte que 57 sièges. En face, le bloc de droite, même avec un Likoud plus faible que prévu, obtient 63 sièges. A moins de s’entendre sur un gouvernement «d’union nationale», Tzipi Livni et Benjamin Netanyahou doivent donc compter sur les « petits » partis et jouer des alliances et des retournements, familiers du système politique israélien. A ce jeu-là, le chef du Likoud a l’avantage. «Tzipi Livni a fait une erreur fatale en s’aliénant le parti religieux du Shass (9 ou 10 sièges) et les partis arabes (6 ou 7 sièges). Elle a perdu une quinzaine de sièges qu’il lui sera difficile de récupérer», poursuit Pinhas Inbari. Le président israélien Shimon Pérès dispose de sept jours pour consulter les différents partis et déterminer qui de Benjamin Netanyahou ou de Tzipi Livni, a les meilleurs de former une coalition. «Je serai le prochain Premier ministre» a assuré le chef de file du Likoud qui a appelé dès mardi soir l’ultranationaliste Avigdor Lieberman pour lui proposer une place dans sa coalition.
3 grands dossiers
Le prochain chef du gouvernement israélien hérite de plusieurs dossiers délicats, dans un pays plus divisé que jamais sociologiquement, économiquement et politiquement. Le processus de paix avec les Palestiniens, dont le redémarrage est réclamé par les États-Unis et la communauté internationale ne peut plus convaincre un grand nombre d##Israéliens. L##environnement régional est très préoccupant, marqué par la course de l##Iran à l##arme nucléaire, et la présence de milices hostiles, Hezbollah et Hamas, aux frontières de l##État. Une conjoncture économique difficile vient compliquer encore un peu plus la tâche déjà délicate du nouveau chef du gouvernement. La question palestinienne apparaît à beaucoup d##Israéliens comme un dossier quasi insoluble, depuis que les accords d##Oslo de 1993 ont volé en éclats avec la seconde intifada, au début des années 2000. Sur la frontière nord, le Hezbollah libanais a cessé ses attaques depuis la guerre de 2006. Mais le mouvement s##est réarmé, et reste une force potentiellement hostile. D##autant que derrière lui comme derrière le Hamas, se profile l##ombre de l##Iran, l##ennemi numéro un d##Israël.
La majorité des experts estime que l##Iran devrait obtenir au cours de l##année à venir la matière fissile nécessaire à la fabrication d##une arme nucléaire. Tous partis confondus, les Israéliens sont décidés à ne pas laisser ce programme aboutir, quitte à lancer une attaque seuls contre l##Iran. L##Administration américaine, dont le soutien est vital pour Israël, risque de ne pas voir d##un très bon œil l##ajournement du processus de paix, ou une action militaire contre l##Iran. Israël a toujours pris seul les décisions concernant sa sécurité, mais ne peut complètement ignorer la position des États-Unis, son meil¬leur allié. À ces dilemmes, s##ajoutent les effets de la crise mondiale, qui a touché Israël comme les autres pays développés.
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Tzipi Livni à Tel Aviv après les législatives israéliennes.
Tzipi Livni, salue ses partisans.
Tzipi Livni, à gauche, et Benjamin Netanyahou, mardi dernier, dans leur QG respectif à Tel Aviv .