Le secrétaire américain au Trésor Henry Paulson a averti mercredi dernier que les Etats-Unis allaient affronter des difficultés économiques pendant “plusieurs mois”, affirmant toutefois que la situation s##améliorerait par la suite à la faveur du plan de sauvetage bancaire. “Nous allons devoir affronter un certain nombre de défis pendant un certain nombre de mois. Cela va prendre du temps pour surmonter cette phase”, a déclaré M. Paulson, interrogé sur la chaîne de télévision ABC à propos du ralentissement économique en cours et d##une possible aggravation du chômage. Il s##est toutefois montré optimiste sur les effets positifs du plan de sauvetage bancaire adopté début octobre par le Congrès et dont il a présenté de nouveaux détails concrets mardi avec notamment l##entrée de l##Etat au capital de dizaines de banques pour 250 milliards de dollars. “Les entreprises n##empruntent plus, des emplois sont en danger, l##épargne retraite des particuliers (souvent placée en actions) s##est réduite, tout comme l##épargne investie”, a-t-il encore constaté. Mais il a assuré que grâce au plan de sauvetage bancaire, doté d##une enveloppe de 700 milliards de dollars, “nous avons stabilisé le système”. Rencontre tripartite Le président américain George W. Bush a rencontré son homologue français Nicolas Sarkozy ainsi que le président de la Commission européenne José Manuel Barroso samedi (hier) à la résidence présidentielle de Camp David, a annoncé la Maison Blanche. “Ils ont l##occasion de parler de nombre de questions, mais l##économie mondiale est évidemment la question centrale”, a dit un porte-parole de la Maison Blanche Gordon Johndroe. Sarkozy, qui préside actuellement l##Union européenne, et M. Barroso avaient déjà prévu de se rendre au Canada en fin de semaine pour une série de réunions, dont un sommet entre le Canada et l##Union européenne (UE), a noté le porte-parole. Les trois hommes discutent la crise financière et de la réunion d##un G8 élargi que Sarkozy appelle de ses voeux pour une “remise à plat du capitalisme financier”, selon l##Elysée. Le président américain a annoncé de nouvelles mesures concrètes du plan de sauvetage des banques adopté le 3 octobre par le Congrès des Etats-Unis, tandis que les Européens se sont entendus sur un plan d##aide massif au secteur financier pour la zone euro. Bush avait discuté par téléphone plus tôt dans la matinée avec les dirigeants britannique, allemand et français de la coordination des efforts pour faire face à la crise financière mondiale. Ces entretiens avec le président Sarkozy, le Premier ministre britannique Gordon Brown et la chancelière allemande Angela Merkel ont porté sur “la poursuite des efforts de coordination sur la situation financière”, a déclaré la porte-parole de la Maison Blanche Dana Perino. Le conseiller diplomatique du chef de l##Etat français Jean-David Lévitte, a précisé que le président américain “souhaitait l##informer (Nicolas Sarkozy) en détail et en primeur des compléments au plan américain qui ont été annoncées par la Maison Blanche”. Fournir des liquidités Par ailleurs, Sarkozy a proposé d##organiser un sommet extraordinaire des dirigeants du groupe des sept pays les plus industrialisés (G7). Dans ces conditions, la Banque de France a revu sa prévision pour le troisième trimestre, estimant, tout comme l##Insee récemment, que le produit intérieur brut se contracterait de 0,1%. Après la baisse de 0,3% déjà enregistrée au deuxième trimestre, cela placerait la France en récession “technique”, même si la croissance devrait bien être positive sur l##ensemble de 2008. L##INSEE table sur 0,9% cette année, le Fonds monétaire international (FMI) sur 0,8% tandis que le gouvernement s##attend à une croissance “autour de 1%”. Mais tous les indicateurs ont viré au rouge et laissent penser que c##est surtout 2009 qui encaissera l##impact de la crise. Si le gouvernement a prévu une croissance comprise entre 1 et 1,5%, le FMI se contente désormais d##annoncer 0,2%. En dévoilant son plan en faveur des banques, le président Nicolas Sarkozy avait insisté sur le fait que l##Etat ne leur apporterait sa garantie qu##à condition qu##elles s##engagent au “financement des particuliers, des entreprises, des PME et des collectivités territoriales” pour “réamorcer la pompe du crédit”. Mais pour les économistes, ce plan, certes salutaire pour les banques, ne pourra à lui seul faire repartir une machine économique à l##arrêt. Dans une “deuxième phase”, il faudra des plans en Europe et aux Etats-Unis pour “soutenir l##activité”, résume Jean-Hervé Lorenzi, président du Cercle des économistes. Fournir des liquidités aux banques serait en effet vain si les entreprises et les ménages gelaient leurs investissements en raison des difficultés économiques. Le gouvernement a certes anticipé en annonçant des mesures pour les secteurs déjà touchés par la crise: automobile, logement et 22 milliards pour les PME. Il a aussi évoqué des “mesures complémentaires” pour faire face à la remontée prévisible du chômage. Problème pour la France, l##infime marge de manoeuvre dont disposait le gouvernement pour un éventuel “plan de relance” par la dépense publique a déjà été mangée par la crise, avec des recettes fiscales moindres et des charges gonflées par l##inflation. Les syndicats revendiquent eux aussi des mesures en faveur de l##emploi et du pouvoir d##achat, qui risquent d##être les principales victimes de la panne de croissance. Même au Medef (des hommes d’affaires), dans un autre registre, Laurence Parisot a jugé que les “décisions prises ne seront efficaces que si les politiques économiques, sociales et fiscales sont conçues en cohérence avec la situation”. Plan européen Les Européens veulent compléter leur plan d##aide bancaire d##urgence en protégeant plus que prévu les épargnants, en soulageant le bilan des banques et en s##attaquant à un sujet qui les divise encore, la création d##une supervision financière paneuropéenne. Bruxelles a aussi proposé de réduire fortement, à trois jours au lieu de trois mois actuellement, les délais de remboursement des déposants en cas de faillite bancaire. “En augmentant la protection minimale, nous renforçons la confiance des Européens dans la sécurité de leurs dépôts”, a fait valoir le commissaire européen chargé du Marché intérieur, Charlie McCreevy. Une manière d##éviter une crise de défiance prolongée à l##égard des banques qui pourrait entraîner des retraits massifs des comptes. Sur un autre front, les Européens ont pris des mesures pour soulager un peu plus les banques en assouplissant leurs normes comptables, jugées pénalisantes dans le contexte de crise financière par rapport aux règles en vigueur aux Etats-Unis. Le directeur général du Fonds monétaire international Dominique Strauss-Kahn a affirmé que toute action non coordonnée au sein de l##Union européenne contre la crise financière devait “être évitée, voire condamnée”. “La coopération et la coordination sont le prix du succès. Toutes les formes de coopération doivent être recommandées. Tout action solitaire doit être évitée, voire condamnée”, a-t-il estimé lors d##une conférence de presse avant l##ouverture de l##assemblée générale du FMI. Legendes Sarkozy au sommet de l##UE à Bruxelles. Aider les pays en difficulté.